Nouvelles "écologiques"

Ne tombez pas dans le panneau…

Un, deux, un, deux !

Coucou, c’est Hedgie le hérisson, souvenez-vous… l’apprenti repor-terre… le journaliste en herbe – comme les prés que je traverse ; c’est de saison !

Hier, je faisais mon patting (c’est genre un footing… mais avec des pattes) à travers champs – un, deux, un, deux ! – quand, arrivant en bordure de l’un, deux, un, deux… pardon ! de l’un d’eux, j’ai assisté à une scène des plus bizarres : au bout de ce champ, une table. À chaque bout de cette table au bout de ce champ, une chaise. Sur chacune des chaises à chaque bout de cette table au bout de ce champ, un homme !
Porté par mes p’tites pattes et la curiosité, je m’approchai pour tâcher de comprendre de quoi il retournait (j’apprendrais plus tard que j’assistais à un fielddating ; une rencontre, genre speed-dating, mais en moins speed, et en plein champ !)

Un, deux, une, deux !

Un champ, deux chaises, une table, deux hommes. Deux… hommes !
Entre nous, j’estime être un hérisson très ouvert, le mélange des genres ne me déganre pas… heu, dérange pas (j’ai d’ailleurs utilisé le mot genre trois fois depuis le début de cet article, alors que l’on ne m’accuse de rien, hein ! LGBT, LGBTQIA ou 2ELGBTQQIA+, je connais, et j’accepte !) Mais là, tout de même, ces deux hommes ensemble, c’était vraiment bizarre.
L’un était habillé d’une salopette assez chouette surmontant une paire de bottes assez bat en caoutchouc assez chou. Un agriculteur ! L’autre portait un costume taillé sur mesure, à ses pieds… des chaussures bien sûr, et un attaché-case. Un business man !
Mais que faisaient donc deux personnes aussi différentes sur cette scène improvisée ? Je n’allais pas tarder à le savoir.

L’amour est dans le pré.

L’agriculteur : Bonjour, je suis Andy.
Le business man (rigolard) : Enchantiez, je m’appelle Teuse…
Andy (qui ne rit pas) : C’est drôle.
Le business man (contrit) : Désolé, j’adore cette blague. Hum… si vous essayiez plutôt de deviner mon prénom ?
Andy (aussitôt) :  Marc.
Le business man : Comment… !!
Andy : Un costume Dior, des chaussures de chez Gucci ; ce sont des vêtements de Marc.
Le business man (sous le charme) : J’ai l’impression qu’on se connait déjà. Je vous trouve très beau.
Andy (sur la défensive) : Hé, je ne suis pas un homme facile, vous ne m’aurez pas à coup de répliques de cinéma, espèce de Medeea Marinescu ! Venons-en au fait : qu’attendez-vous de moi ?
Le business man (se reprenant) : Je vois que monsieur connait ces classiques ! Dans ce cas, je n’irai pas par quatre chemins, d’autant que pour venir ici il n’y en a qu’un : j’aimerais me… marier avec vous !
Andy (se récriant) : Allons, voyons, on ne s’aime pas !
Le business man : Vous, si. D’ailleurs, c’est la période : blé, orge… En hiver, ce sera les semailles de seigle et de froment. Vous voyez : on se connait déjà un peu ! C’est suffisant pour un beau mariage.
Andy (outré) : Pff ! un mariage arrangé !
Le business man (s’emparant de son attaché case) : Un mariage arrangé, un contrat à sortir ! Vos champs, je veux les louer ! L’amour est dans le prêt, mon cher. Permettez que je vous appelle ainsi, vu tout ce que vous allez vous faire ! Je vous assure, vous gagnerez à me connaitre !
Andy : Mon âme n’est point à vendre, mes terres ne sont pas à louer.
Le business man : Allons donc ! De nos jours, même les poulets le sont ! Signez-là, et votre terre arable j’en fais une terre à fric, promis ! Écoutez la musique : 30 ha loués pendant 30 ans, 3.2 millions à terme échu pour vous ; capital et intérêts placés, et ce, même à 3 % l’an, sans prendre en compte l’inflation ! Vos champs y feront toujours du blé, mais plus ! Bien plus !
Andy (effrayé) : Comment… ?
Le business man (extatique) : En y plantant des graines d’une nouvelle sorte, de sorte que dans six mois, dans six petits mois, sortirons de terre de magnifiques tournesols. Photovoltaïques ! Alléluia, que tourne les sols en tournesols !
Andy (horrifié) : Mais ce n’est pas ce que je veux ! Écoutez-moi : un jour, un homme rencontre trois fermiers. Au premier qui travaille son champ, l’air sombre et fatigué, il demande ce qu’il fait. « Je creuse un sillon » lui répond-on. L’homme repose la  question au second qui effectue le même travail. Ce dernier lui explique qu’il cultive un champ. L’homme s’approche alors du troisième qui parait heureux alors qu’il fait exactement la même chose que les deux autres, avec les mêmes outils. Quand il lui demande ce qu’il est en train de faire, l’autre lui répond, avec un large et lumineux sourire : « Je nourris les hommes, et je prends soin de la nature ! »
Le business man (haussant les épaules) : Hum.. rien compris !
Andy : Je donne un sens à mon travail ! La terre doit servir à nourrir les hommes, les hommes à nourrir la terre. Mes terres, j’en prend soin. Bayer-Mosanto-NPK j’en veux pas ! Avec eux, je ne suis pas tombé dans le panneau, alors les vôtres…
Le business man : Mais les panneaux, c’est écolo ! L’herbe dense danse dessous, en plus y aura des moutons !
Andy :  Pff ! outre la réduction de la production agricole, les champs sont clos, les couloirs écologiques rompus. En plus, la flore reste pauvre, et les moutons bien souvent absents. Et puis, ça perturbe les chiroptères et les oiseaux ! Drôle d’écologie !
Le business man (se récriant) : Mais l’énergie (verte) est notre avenir ! Hé, connot, misons-là.
Andy : Pas à n’importe quel prix cependant ! Améliorez votre modèle : il est greenwashé, ne profite qu’à une minorité : promoteurs, grands propriétaires fonciers versus petits exploitants. J’ai des valeurs, voyez-vous !
Le business man : Moi-aussi… en banque ! Allons, allons, trouvons un terrain d’entente.
Andy : Pas le mien en tout cas !
Le business man (se mettant à chanter) : Allez, Andy, quoi, oh dis-moi oui, Wo wo chou ! Chéri
Andy : Je vous prie de Ringer votre chanson, avec moi ça ne prend pas !
Le business (sortant une brosse de son attaché case) :  J’aimerais tant vous peigner dans le sens du poil !
Andy (se levant, digne) : Partez, monsieur, quittez mon pré sur le champ !

Greenwashé contre rouge fâché

J’ai vu que la moutarde montait au nez de l’agriculteur parce qu’il n’arrêtait pas de crier : « Il n’y a que semailles qui m’aillent ! ». Devant la colère d’Andy le business man s’est vite carapaté ; il avait le blues. Avant de partir, il a rangé sa brosse dans son attaché case ; elle était devenue inutile.
Bizarre, hein, comme histoire ?

Note de l’auteur :
Dans le cadre du Green Deal européen qui ambitionne de favoriser les énergies renouvelables pour accélérer la transition énergétique, le gouvernement français veut développer ses parcs d’énergies propres. Pour cela, il a fixé des objectifs à atteindre pour les trente prochaines années dont le développement du photovoltaïque. Mais 2050, c’est demain ! Il s’engage dès lors à marche forcée pour respecter l’échéance, et dans les campagnes fleurissent des champs entiers de panneaux solaires recouvrant peu à peu les terres agricoles.
Cet article veut illustrer une des (nombreuses ?) incohérences où conduit la précipitation dans la mise en place de mesures écologiques quand les études d’impacts sont partielles, quand la logique financière (bien plus vert tueuse que vertueuse) s’en mêle ; bref, quand la vision holistique des projets est absente. Si la France a besoin d’énergie photovoltaïque, ce besoin ne doit pas être satisfait au détriment des hôtes des campagnes, ni des terres arables qui, elles, sont destinées à couvrir nos besoins alimentaires.
En un mot, l’écologie, oui ! mais pas n’importe comment !
Pour plus d’informations, je vous engage à lire l’article : Photovoltaïque : ruée sur les terres – Le site du journal L’âge de faire (lagedefaire-lejournal.fr) ainsi que celui page 19 de l’âge de faire n°182.

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